Les couteaux en bois trempé sont trois fois plus tranchants que les couteaux de table.

Le bois et le métal naturels sont des matériaux de construction essentiels pour l'humanité depuis des milliers d'années. Les polymères synthétiques que nous appelons plastiques sont une invention récente qui a connu un essor fulgurant au XXe siècle.
Les métaux et les plastiques possèdent tous deux des propriétés parfaitement adaptées aux usages industriels et commerciaux. Les métaux sont robustes, rigides et généralement résistants à l'air, à l'eau, à la chaleur et aux contraintes constantes. Cependant, leur production et leur raffinage nécessitent davantage de ressources (et sont donc plus coûteux). Le plastique remplit certaines fonctions du métal tout en étant moins lourd et très bon marché à produire. Ses propriétés peuvent être personnalisées pour presque tous les usages. Toutefois, les plastiques bon marché du commerce sont de piètres matériaux de construction : les appareils électroménagers en plastique sont à proscrire, et personne ne souhaite vivre dans une maison entièrement en plastique. De plus, ils sont souvent raffinés à partir de combustibles fossiles.
Dans certaines applications, le bois naturel peut rivaliser avec les métaux et les plastiques. La plupart des maisons individuelles sont construites sur une ossature bois. Le problème est que le bois naturel est trop tendre et trop sensible à l'eau pour remplacer le plastique et le métal dans la plupart des cas. Un article récent, publié dans la revue Matter, explore la création d'un matériau en bois durci qui surmonte ces limitations. Ces recherches ont abouti à la fabrication de couteaux et de clous en bois. Ce couteau en bois est-il performant et l'utiliserez-vous prochainement ?
La structure fibreuse du bois est composée d'environ 50 % de cellulose, un polymère naturel aux propriétés de résistance théoriquement élevées. L'autre moitié est principalement constituée de lignine et d'hémicellulose. Si la cellulose forme des fibres longues et robustes qui confèrent au bois sa résistance naturelle, l'hémicellulose, quant à elle, possède une structure peu cohérente et ne contribue donc pas à cette résistance. La lignine remplit les vides entre les fibres de cellulose et remplit des fonctions essentielles au bois vivant. Cependant, pour les besoins humains de compactage du bois et de renforcement des fibres de cellulose, la lignine s'avère être un obstacle.
Dans cette étude, du bois naturel a été transformé en bois durci (BD) en quatre étapes. Premièrement, le bois est bouilli dans une solution d'hydroxyde de sodium et de sulfate de sodium afin d'éliminer une partie de l'hémicellulose et de la lignine. Après ce traitement chimique, le bois est densifié par pressage pendant plusieurs heures à température ambiante. Ce procédé réduit les pores naturels du bois et renforce la liaison chimique entre les fibres de cellulose adjacentes. Ensuite, le bois est pressurisé à 105 °C (221 °F) pendant quelques heures supplémentaires pour achever sa densification, puis séché. Enfin, le bois est immergé dans de l'huile minérale pendant 48 heures afin de rendre le produit fini imperméable.
L'une des propriétés mécaniques d'un matériau de construction est sa dureté par indentation, qui mesure sa capacité à résister à la déformation sous l'effet d'une force de compression. Le diamant est plus dur que l'acier, l'or, le bois et même la mousse d'emballage. Parmi les nombreux tests d'ingénierie utilisés pour déterminer la dureté, comme l'échelle de Mohs en gemmologie, le test Brinell est l'un d'eux. Son principe est simple : une bille métallique dure est pressée contre la surface à tester avec une force déterminée. On mesure ensuite le diamètre de l'empreinte circulaire créée par la bille. La valeur de dureté Brinell est calculée à l'aide d'une formule mathématique ; en résumé, plus l'empreinte est grande, plus le matériau est tendre. Lors de ce test, le diamant est 23 fois plus dur que le bois naturel.
La plupart des bois naturels non traités absorbent l'eau. Cela peut entraîner leur gonflement et, à terme, altérer leurs propriétés structurelles. Les auteurs ont utilisé un trempage minéral de deux jours pour accroître l'hydrophobie du bois, le rendant plus résistant à l'eau. Le test d'hydrophobie consiste à déposer une goutte d'eau sur une surface. Plus la surface est hydrophobe, plus les gouttelettes d'eau sont sphériques. À l'inverse, une surface hydrophile étale les gouttelettes (et absorbe donc l'eau plus facilement). Ainsi, le trempage minéral augmente non seulement significativement l'hydrophobie du bois, mais empêche également ce dernier d'absorber l'humidité.
Lors de certains tests d'ingénierie, les couteaux HW ont obtenu des résultats légèrement supérieurs à ceux des couteaux en métal. Les auteurs affirment que le couteau HW est environ trois fois plus tranchant qu'un couteau du commerce. Cependant, ce résultat intéressant comporte une limite. Les chercheurs comparent des couteaux de table, ou ce que l'on pourrait appeler des couteaux à beurre. Ces derniers ne sont pas conçus pour être particulièrement tranchants. Les auteurs présentent une vidéo de leur couteau coupant un steak, mais un adulte en bonne force physique pourrait probablement couper le même steak avec le dos émoussé d'une fourchette en métal, et un couteau à steak serait bien plus efficace.
Qu'en est-il des clous ? Un simple clou en bois peut apparemment être enfoncé facilement dans une pile de trois planches, même si la précision est moindre comparée à l'utilisation de clous en fer. Des chevilles en bois peuvent ensuite maintenir les planches ensemble, résistant à la force qui les séparerait, avec une solidité comparable à celle des chevilles en fer. Cependant, lors de leurs tests, les planches ont cédé avant les clous, ce qui explique que les clous les plus résistants n'aient pas été testés.
Les clous HW présentent-ils d'autres avantages ? Les chevilles en bois sont plus légères, mais le poids de la structure n'est pas principalement dû à la masse des chevilles qui la maintiennent. Les chevilles en bois ne rouillent pas. Cependant, elles ne sont pas imperméables à l'eau et ne sont pas biodégradables.
Il ne fait aucun doute que l'auteur a mis au point un procédé permettant de rendre le bois plus résistant que le bois naturel. Toutefois, l'utilité de ces matériaux pour une application particulière nécessite des études complémentaires. Peuvent-ils être aussi bon marché et moins gourmands en ressources que le plastique ? Peuvent-ils rivaliser avec des objets métalliques plus résistants, plus esthétiques et réutilisables à l'infini ? Leurs recherches soulèvent des questions intéressantes. Les développements techniques en cours (et, à terme, le marché) y répondront.


Date de publication : 13 avril 2022